Le rabbin Elliot Dorff (né en 1943) est un des rabbins conservative/massorti américains les plus influents. Philosophe, théologien, spécialiste de bioéthique, professeur au séminaire rabbinique de Californie, il est l’auteur de nombreux livres ainsi que de responsa juridiques sur différents aspects de la loi juive.
Dans un livre consacré à la place qu’occupent les penseurs juifs du mouvement conservative/massorti au sein de la philosophie du judaïsme contemporain intitulé « The unfolding tradition, jewish law after Sinai » (Aviv Press, New York, 2005), il consacre le premier chapitre à une longue définition du judaïsme conservative/massorti, et parle entre autres de son positionnement intermédiaire vis-à-vis de la halakha :
« En termes de loi juive, adopter une position intermédiaire signifie que le mouvement conservative/massorti s’engage à enseigner les pratiques rituelles et les principes éthiques du judaïsme aux juifs de tous âges, les encourageant à les respecter dans leurs vies privées et publiques. Cela signifie également que de temps à autre, le mouvement conservative/massorti adopte certaines modifications dans la pratique juive, en y ajoutant certaines choses (cérémonies de bat mitzvah, cérémonies pour la naissance des filles, prières pour l’État d’Israël , y compris une bénédiction avant le Hallel ce jour-là et un paragraphe à inclure dans la ‘Amidah), en annulant d’autres (suppression des obstacles à la participation active des femmes dans la vie religieuse), ou encore modifiant certaines habitudes (assise mixte lors des offices, hommes et femmes étudiant ensemble les mêmes sujets, ou encore des ajouts à la ketoubah, l’acte de mariage, afin de protéger la capacité de la femme à se remarier en cas de divorce). »
Autrement dit, lorsque le judaïsme conservative/massorti choisit de modifier ou de faire évoluer certains aspects de la halakha, ce n’est pas -comme on le croit souvent- uniquement pour en retrancher ou annuler certains aspects choquants ou ne correspondant plus au monde moderne. C’est aussi parfois pour ajouter certains commandements qui paraissent nécessaires au vu des bouleversements majeurs que le judaïsme a connu au XXème siècle.
L’avènement du sionisme et l’indépendance de l’Etat d’Israël en est un bon exemple.
Dimanche dernier, une cérémonie extrêmement émouvante s’est tenue au Kotel : à l’initiative de l’Organisation Sioniste Mondiale, des juifs de tous les courants du judaïsme (Orthodoxes, libéraux, Massortis, laïques) se sont réunis comme une fête juive traditionnelle, pour lire un des textes qui constituent notre identité. La Torah ? La Méguilah d’Esther ? Les Psaumes du roi David ? Non. La déclaration d’indépendance de 1948. Sur un rouleau. Avec les Téamim, la cantillation traditionnelle des textes saints.
Ce n’était pas la première fois que le peuple juif assimilait un événement de son histoire par un rituel communautaire religieux. Mais c’était la première fois que le jour de l’indépendance de l’Etat d’Israël (Yom Haatsmaout) était célébré de cette façon.
Dans quelques années, lorsque ce sera devenu une tradition dans toutes les synagogues du monde, vous saurez qu’il y a eu une première fois. Et que cette première fois a été initiée par des juifs religieux, soucieux d’innover afin d’adapter le judaïsme à l’Histoire.
Pour revoir la cérémonie :
En hébreu : https://fb.watch/4PYNAIikPL/
En anglais: https://fb.watch/4PYHzZzY8y/
En français: https://fb.watch/4PYKxz9B2g/
En espagnol: https://fb.watch/4PYM3_y3iQ/
Hag Haatsmaout saméah et chabbat chalom !